Chapitre I : Apprentissages

Publié le 14 Décembre 2012

1.1 Le solfège comme frein pour l’enfant

Pour un enfant de huit ans, animé par l’envie de pratiquer le piano, le solfège est indispensable. C’est en effet un prérequis demandé par la plupart des professeurs de musique. L’enfant qui connait son solfège pourra comprendre les exercices et se concentrer sur la pratique. Cette situation peut sembler quelque peu illogique dans la mesure où il s’agit d’apprendre à lire une langue avant d’avoir appris à la parler. Dans cette séparation réside le paradoxe essentiel de l’apprentissage musical. L’enfant attiré par la pratique musicale doit donc faire face à un ou deux ans de travail théorique avant même de pouvoir toucher un instrument. Mais qu’est-ce que le solfège pour d’un enfant de huit ans qui n’a pas d’éducation musicale ? La musique est abstraite par définition, car elle est sonore et non matérielle. Lorsqu’il s’agit de la coucher sur le papier, on peut facilement faire l’analogie avec l’écriture des mathématiques qui pose tant de problèmes à la compréhension.

L’écriture musicale fait en effet appel à de nombreuses notions abstraites. Cette abstraction me semble résulter du paradoxe du cours de solfège susdit : en 5 ans de formation, jamais un élève n’aura un instrument de musique entre les mains durant le cours. Le seul outil de traduction musicale est le piano à disposition du professeur. L’enfant sera donc amené à apprendre à lire la musique sans pouvoir la pratiquer.

La compréhension même de cette musique ne semble pas indispensable à l’académie de Belgique. En effet, les bases de l’histoire et le fonctionnement des instruments ne font pas partie du socle de compétences nécessaires. Notons que nombre de professeurs non dénués de bon sens enseignent malgré tout ces notions à leurs élèves.

Enfin, la plus grande invraisemblance du cours me semble être la suivante : durant cette formation de 5 années, jamais l’enfant ne sera amené à réaliser une composition, même extrêmement simple. Pourquoi ce tabou ? Peut-être s’agit-il d’un héritage du monde de la musique classique qui considère la composition comme un art réservé au maître et non à l’élève. La raison évoquée par les professeurs est la jeunesse des élèves (sic). La raison principale me semble plutôt d’ordre technique : rares sont les musiciens qui peuvent composer sans un instrument de musique entre les mains.

Le travail à la maison, après le cours, souffre du même paradoxe : cette étape est extrêmement déterminante dans l’efficacité de l’apprentissage. Or, l’enfant se retrouve seul. Personne ne peut corriger ses erreurs qu’il répètera sans les remarquer. Il sera amené à réciter par cœur un enchainement de notes avant même de l’avoir entendu, et donc compris. L’enfant est livré à lui-même dans un exercice de récitation des plus rébarbatifs. Il y a donc là matière à réviser dans le cadre d’une recherche d’un nouvel enseignement.

 

 

1.2 Le cours de musique dans l’enseignement secondaire

Il semble indispensable d’observer les ressorts et les outils du cours de musique dans l’enseignement secondaire (12-13 ans), car on peut trouver beaucoup de réponses au classicisme du cours en académie. En effet, ce cours est prévu dans le programme de l’enseignement général, il s’adresse donc à tous les élèves, intéressés ou non.

Bien sûr, la différence primordiale est la pratique : la flute, le plus souvent. Au premier cours, on commencera par apprendre différentes positions sur la flute, et c’est en second lieu que l’on viendra l’associer à une note sur la portée. Si la pratique ouvre ici le cours de musique, elle n’intervient qu’après un an dans l’apprentissage par le solfège.

Le cours de musique propose une approche globale de la question musicale. On y aborde les partitions, mais aussi l’histoire de la musique et des différentes familles  d’instruments. La notion d’éveil musical qui régit le cours de musique est-elle à proscrire du cours de solfège ? L’écriture musicale peut être remise dans son contexte physique et pratique pour être mieux assimilée.


1.3 Les langages alternatifs

Le solfège est-il réellement indispensable à l’apprentissage de la musique ? La question se pose en effet, puisqu’il est si courant de rencontrer des musiciens autodidactes. Il faut cependant remarquer que ces praticiens ne maitrisent pas moins une écriture propre à leur instrument. Nombre d’entre eux sont des guitaristes et sont familiers avec les tablatures, où est annotée la position des doigts sur les cordes. Beaucoup d’adeptes de la musique électronique ont également fait l’économie de l’apprentissage du solfège sans en être handicapés. Ils maitrisent néanmoins le langage propre à ce type de musique : le séquenceur. Dans le même ordre d’idée, on pourra mentionner les partitions d’orgues de barbarie ou la cithare russe.

 


Cependant, ces solutions alternatives trouvent leur limite lorsque le musicien est amené à jouer en groupe. Dans ce contexte, le solfège permettra une communication entre des musiciens pratiquant des instruments fondamentalement différents. Ce caractère rassembleur va également au-delà des styles musicaux et des cultures. On constate d’ailleurs que les méthodes alternatives à l’académie se veulent un palier pour l’enfant, et proposent toujours le solfège comme finalité. Les écritures marginales ont un intérêt certain : elles sont pour la plupart extrêmement instinctives et utilisent des représentations graphiques bien plus évidentes que le solfège. Alors qu’elles se présentent comme des écritures alternatives, ne pourrait-on pas s’en inspirer dans le but de faciliter l’accès au solfège ?

Ne manquons pas de nous inspirer de la révolution apportée par l’écriture de partition sur ordinateur. Si le langage reste le même, une toute nouvelle vision du solfège est proposée. Le logiciel peut interpréter la partition avec un son électronique, pour en avoir une audition directe. Il peut également signaler des erreurs de rythme et de gammes, tel un correcteur d’orthographe. Plus qu’une amélioration du confort d’écriture, l’éditeur de partition numérique possède des vertus didactiques.

Chapitre I : Apprentissages

Le concept de piano roll est l’équivalent numérique du papier musical perforé de l’orgue de barbarie. Cette représentation graphique permet d’écrire la musique de manière instinctive.

Rédigé par Pierre Collard

Publié dans #memoire

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